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FAIRE OU NE PLUS FAIRE
OU
COMMENT LUTTER CONTRE LA SURCHARGE DE TRAVAIL, L'EXPLOITATION ET LE FATALISME
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Une ligne de conduite générale consisterait à faire le tri
entre l'obligatoire et le subsidiaire, le superflu, le bénévolat non reconnu
et non rémunéré donc :
- à s'en tenir à nos obligations, ce serait déjà beaucoup
- à ne pas être tenté ou ne pas se sentir contraint à un
zèle excessif que l'on vous reprocherait un jour
- à ne jamais vous substituer à d'autres, même si la nature
a horreur du vide ; ça vexe, ça froisse les susceptibilités, ça n'arrange
et ne règle souvent rien et ça ne procure que rarement la reconnaissance d'autrui
- à ne jamais proposer ou faire « à la place de »,
c'est prétentieux et anti-pédagogique, ça déresponsabilise et c'est donc contre-productif
car l'entourage devient contemplatif à défaut d'être admiratif.
- à répartir au mieux les taches au sein de l'équipe en conseil
des maîtres, c'est l'une de ses prérogatives
- à oser poser les vrais problèmes de fonctionnement avec
le Maire, l'IEN, les collègues, les intervenants, les Assistants d'Education,
les parents... et trouver les solutions
- à ne pas reprendre à son compte un problème posé à d'autres
et qui n'aurait pas été résolu
- à savoir mettre en balance certaines réalisations « prestigieuses
» pour lesquelles vous pensez qu'on vous admire, avec votre gentil bénévolat
(qui rime avec médaille en chocolat)
- à ne plus croire que tout dépend de vous par excès de prétention
... ou de naïveté
- à accepter que le projet de l'école et surtout sa réalisation
au cours de l'année soit une œuvre collective dans laquelle chacun doit
prendre sa part des réussites et des imperfections
- à accepter que certaines choses ne se fassent pas...
ou ne se fassent plus quand l'implication de l'équipe faiblit; le directeur
n'est pas le remède, la solution magique ou le joker des situations régressives
ou bloquées
- à savoir refuser, différer, abandonner, transférer ce qui
ne peut pas être pris en charge par l'équipe dans des conditions normales
de fonctionnement surtout quand on nous refuse d'aménager et de réduire le
temps de travail
- à faire son travail honnêtement, avec, comme garde-fou,
l'espace de sa vie privée, la préservation de son équilibre familial, de sa
santé physique et psychique et surtout le plaisir de continuer : un directeur
défaillant, malade, dépressif, démissionnaire n'est pas un modèle pour ses
trop rares successeurs.
Les exemples cités plus bas paraîtront parfois excessifs ;
ils sont le reflet de certaines réalités vécues, de dérives constatées et d'un
fatalisme trop répandu.
Voici donc quelques exemples... à ne pas suivre :
- inscrire des élèves pour le compte de la mairie : vous
enregistrez... sur le registre après inscription en mairie.
- tenir le rôle du trésorier de l'A.S.S ou de l'O.C.C.E :
présider, ça suffit ! Tout enseignant
de l'école sait compter.
- assurer de A à Z la gestion des photos d'école ou des commandes
de fin d'année : collecter et vérifier, c'est
déjà long.
- tenir le rôle de gestionnaire de la B.C.D. : contrôler
c'est bien ! D'autres que vous savent couvrir, enregistrer, classer aussi
bien que vous...
- animer des ateliers sur le temps de décharge : en
auriez vous trop ? Certains disent en manquer.
- se déplacer hors de l'école pour le compte de la mairie,
de l'IEN, d'une association : est-ce bien
votre mission et avez vous un ordre de mission pour le faire ?
- participer à des réunions Mairie, IEN, synthèse RASED,
équipe éducative, Projet d'Accueil Individualisé, Convention d' Intégration,
C.L.E, C.E.L... sans remplacement : est-ce
bien honnête vis à vis des élèves de votre classe et des collègues qui les
reçoivent ?
- déplacer les réunions hors temps scolaire pour « arranger »
les partenaires : vous, on vous « arrange »
souvent ?
- répondre aux sollicitations extérieures souvent sans intérêt
pour l'école et pour le directeur : sauf
si votre service relations publiques est au chômage technique.
- répondre aux enquêtes diverses n'ayant pas de caractère
réglementaire et obligatoire : à moins
que vous pensiez que ces enquêtes vous apporteront ce qui vous fait défaut,
comme le temps par exemple et accessoirement un peu de reconnaissance... financière
bien sûr.
- envoyer les compte-rendu des réunions (C.C., C.M., C.E.) :
les tenir à disposition, ça économise le courrier
et les vrais intéressés se déplaceront pour lire votre prose.
- fournir du papier et des enveloppes à l'administration
(IEN, RASED, CCPE...) : chacun son budget
et les Euros seront bien mieux utilisés !
- accepter des convocations de l'IEN en individuel ou en
petit groupe sans connaître le motif :
on incite et on fait plus facilement pression sur un petit auditoire.
- accepter une réunion IEN, Mairie... sans ordre du jour
préalable : ça cache un mauvais coup ou
une réunion bidon car vous ne pourrez préparer aucune intervention.
- accepter une réunion sans un compte rendu diffusé :
ce n'est ni transparent, ni courageux ;
comme disent des jeunes, « taper la discute » ne donne que l'apparence
de la véritable citoyenneté.
- accepter de participer à une réunion sans connaître, au
préalable, la liste des participants :
il est préférable de savoir avant toute réunion de quoi et aussi avec qui
on va débattre.
- accepter de participer à des jurys divers jamais indemnisés :
sauf si vous avez le goût des médailles en
chocolat.
- accepter de travailler pour la mairie sans contrepartie
financière (cantine, pointage, accueil, étude...) : sauf
si vous gagnez déjà trop en fin de mois.
- gérer par défaut le temps de midi ou celui de l'accueil
(surveillance, accidents, vols, problèmes divers) : sauf
si vous comptez succéder à Mère Thérésa, Sœur Emmanuelle ou l'Abbé Pierre...
- se substituer au Maire pour résoudre certains problèmes
(paiement cantine, accidents du midi, absence d'un animateur...) : à
moins que vous n'attendiez la reconnaissance éternelle du Maire.
- se substituer à la mairie pour résoudre certains conflits
(surveillance cantine, coût de l'accueil, qualité des menus...) : sauf
si l'oisiveté vous guette et que vous préfériez les soucis du Maire aux vôtres.
- assurer le remplacement d'un collègue absent sur votre
temps de décharge : en feriez-vous
autant pour l'agent territorial chargé du ménage, de la cuisine ou des espaces
verts ou bien pour l'ATSEM aux attributions tout autant essentielles ou encore
l'Assistant d'Education en stage ?
- se substituer à d'autres institutions occasionnellement
ou chroniquement défaillantes : sauf à
avoir manqué votre vocation de policier, de curé, de docteur, de juge, d'éducateur
de rue ou d'assistante sociale...
- jouer à l'infirmière, à la nounou ou à l'animateur de quartier:
à moins que vous ayez reçu la panoplie complète
à Noël.
- monter des projets à la place des collègues : comme
vous, ils sont dotés d'un cerveau jugé conforme par l'IUFM et le MEN, sans
compter les questions essentielles concernant la susceptibilité et de la liberté
pédagogique de chacun.
- faire vivre seul des projets collectifs (chorale, projet
arts plastiques...) : éblouis par votre
maîtrise, les autres collègues sont découragés d'en faire autant.
- réfléchir, rédiger et mettre en œuvre - seul -
le projet d'école ou son actualisation annuelle : sauf
si votre ego vous pousse à l'identification complète avec « votre »
école.
- corriger, collecter les évaluations C.E2 seul : le
travail d'équipe, ça a du bon !
- assurer seul les liaisons maternelle-élémentaire-collège :
l'ubiquité est un art difficile.
- répondre au téléphone pendant la classe : pensez
au répondeur, à l'assistant d'éducation, à l'ATSEM... et à vos parents d'élèves
qui vous reprocheront de délaisser leurs enfants.
- faire à la place du conseil des maîtres ou du conseil de
cycle : il est majeur, vacciné et... maître
de ses délibérations, de ses décisions et de son fonctionnement.
- surveiller la récréation pour arranger un collègue toujours
débordé : sauf si l'utilisation intensive du
sifflet est nécessaire à votre équilibre et à votre bonne humeur.
- accepter les entretiens sans rendez-vous, au pied levé,
n'importe quand : votre chère et tendre
moitié vous attend à la maison et n'a pas à fixer de rendez-vous pour vous
retrouver en famille à des heures honnêtes.
- gérer les problèmes de l'école d'à côté où il n'y a pas
de directeur : François F. dans
sa grande bonté, y pourvoira !
- jouer le DRH ou le chef d'orchestre avec les intervenants,
les A-E, les ATSEM... : à chacun ses responsabilités !
- vous laisser tenter par l'offre de faisant fonction de
conseiller pédagogique ou de maître-formateur : votre
école serait orpheline et Saint François de la rue de Grenelle ne reconnaît
pas souvent les siens.
- acheter le café, faire le café, servir le café et faire
la vaisselle : surtout sans plateau, sans
tablier et sans sourire ad hoc ; la véritable collégialité doit trouver
ici tout son sens.
- transformer votre école en moulin, en club, « lieu
de vie », en espace de rencontres, en parc de loisirs et d'attractions
du quartier (carnaval, kermesse, semaine des parents, activités du mercredi
ou des vacances...) : à moins qu'une future
reconversion chez Disney ou au Club Med vous obsède.
- laisser les parents, des collègues, la municipalité, une
association ou encore l'IEN vous prescrire vos actions et vos projets :
sauf si ce jeu amusant consiste à inverser régulièrement les rôles.
- croire que la disponibilité 24/24 et 7/7 s'applique
aux directeurs : cela concerne les pressing,
l'assistance automobile, SOS médecin, le 15, le 18, le 119 mais pas vous ! ...
enfin, pas encore...
Jean-Marc DEVÔGE, Secrétaire Général...
et directeur d'école heureux.